Dis-moi ce que tu votes, je te dirai qui tu es, Épisode 3

Loi portant mesures d’urgence relatives au fonctionnement du marché du travail

Le 21 décembre 2022, une nouvelle réforme du régime d’assurance chômage a été adoptée. Autorisé par cette loi à agir par décret, le gouvernement a publié au Journal officiel le 27 janvier 2023, le décret du 26 janvier 2023 qui a aménagé les règles d’indemnisation des demandeurs d’emploi.

Qu’en est-il des votes et interventions à l’Assemblée nationale de M. Laurent Croizier, député de la macronie pour la 1ère circonscription du Doubs ?

Souvenons-nous du cadre dans lequel s’inscrit cette nouvelle loi anti-chômeurs. La réforme de 2019 a déjà entraîné une diminution de l’indemnité journalière en moyenne de 17% pour 11,5 millions d’allocataires, cette nouvelle réforme s’attaque désormais à la durée de l’indemnisation en revenant sur le principe de base qui ouvre au salarié le droit à un jour indemnisé pour un jour travaillé. C’est la fameuse « contracyclicité » c’est-à-dire un modèle d’indemnisation avec une durée des droits modulée en fonction de la conjoncture économique.

En fonction d’indicateurs économiques (taux de chômage inférieur à 9% ou progression de moins de 0,8% par trimestre), la durée de l’indemnisation baisse et inversement. Quand la conjoncture est jugée bonne – comment le déterminer d’ailleurs ? et qui le détermine ? –  la durée d’indemnisation est réduite de 25 % ! Un.e salarié.e qui aura cotisé pour 24 mois de droits au chômage n’en touchera finalement que 18, se voyant privé.e des droits pour lesquels iel aura pourtant cotisé.

Qui plus est, cette mesure porte une atteinte majeure au principe de fraternité en conditionnant la meilleure protection sociale des un.es par le régime d’assurance chômage à la perte d’emploi involontaire des autres. Vieille revendication patronale, cela va surtout frapper de plein fouet celleux qui ont des difficultés pour trouver un emploi, celleux qui sont déjà les plus eloigné.es du marché de l’emploi, les plongeant plus avant dans la précarité.  Les chiffres sont cependant tenus et pourtant M. Croizier s’insurge avec toujours le même sens de l’argumentation : « Ce n’est pas vrai ! ».

La réalité est que cette loi qui est entrée en vigueur ce 1er février 2023 prévoit :

  • De laisser la main au gouvernement pour déterminer par décret les règles de l’assurance chômage. Il acte ainsi la fin du paritarisme, c’est-à-dire la détermination des règles de l’assurance chômage dans le cadre d’une négociation entre syndicats salariés et patronaux.
  • La perte de droits à l’assurance chômage pour les salariés en CDD ou en intérim qui refusent deux CDI, les privant de l’indemnisation du risque de perte involontaire d’emploi contre lequel ils sont pourtant assurés. Faut-il rappeler que notre système est un système d’assurance et non d’assistance. Cette disposition est disproportionnée. Elle plongera des demandeurs d’emploi dans la pauvreté, situation que connaissent déjà 38,9 % d’entre eux.
  • D’introduire une présomption de démission en cas d’abandon de poste. Là encore, il s’agit de considérer le salarié comme fautif de sa situation, comme celui qui souhaite désorganiser l’entreprise, abandonner son poste… Alors même que ces situations sont la plupart du temps révélatrices d’un véritable mal être au travail.

Voilà donc ce pourquoi M. Croizier a voté. Un modèle qui considère le chômeur comme responsable de sa situation dans un pays où on compte 373 100 emplois vacants pour 6,16 millions d’inscrits à Pôle emploi. Un modèle où on ne s’attaque pas aux causes du chômage mais aux chômeurs. Des mesures qui ne feront en réalité qu’accentuer les situations de précarité en réduisant les droits des salarié.es.

Un modèle où l’on considère la fraude sociale comme LE mal qui ronge nos finances publiques. Évaluée à 700 millions d’euros et eu égard aux quelques 80 à 100 milliards de fraude fiscale estimée chaque année et 200 milliards d’argent public versé sans contrepartie tous les ans aux grands groupes, tout est relatif !

L’assurance chômage, c’est 45 milliards en 2019 (chiffre du ministère du travail) contre 75 milliards d’euros d’allègement du coût du travail qui bénéficient presqu’exclusivement aux grandes entreprises privées. Une question me taraude, qui sont les véritables assisté.es ?

Suite au prochain épisode…

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