La mère des batailles, la bataille des retraites
L’année 2023 fait d’ores et déjà date dans l’histoire des mouvements sociaux en France. Une intersyndicale unie, un front politique à gauche uni, un gouvernement passé à un cheveu de la censure, une mobilisation populaire sans précédent depuis 1968 avec des millions de personnes dans les rues, à l’appel de l’intersyndicale mais aussi avec des manifestations spontanées qui ont et vont continuer à mailler le territoire en ce début de printemps. Un harcèlement populaire qui fait que Macron ou ses ministres ne peuvent plus se déplacer dans le pays et dans le monde sans être sous les huées du peuple.
Serait-ce le printemps du peuple ? Je l’appelle de mes vœux, en militante de la révolution citoyenne.
Cette année 2023 sera également marquée par la violence avec laquelle Macron et son gouvernement ont répondu à la contestation à l’Assemblée et dans la rue.
Avant de commenter les débats qui se sont déroulés à l’Assemblée, il est important de revenir sur le contexte et sur ce qu’il s’est passé dans notre pays durant cette séquence. Une séquence qui n’est pas terminée, tant à la crise sociale s’est ajoutée une crise politique et de régime.
Macron a montré une nouvelle fois la façon dont il envisage de gouverner : par la force.
Quoiqu’il en coûte pour les corps et les esprits, quoiqu’il en coûte pour notre République.
Violence institutionnelle
Sur le plan des institutions, à travers l’empilement des armes du parlementarisme rationalisé prévues par la Vème République pour permettre à l’exécutif d’imposer sa politique au Parlement : véhicule législatif avec l’article 47-1 de la Constitution pour limiter le temps de débat avec l’usage d’une loi de financement rectificative de la sécurité sociale, article 44-2 et 44-3 de la Constitution, procédure dite du « vote bloqué » au Sénat, afin de limiter le droit d’amendement des parlementaires, une commission mixte paritaire digne d’une vaste supercherie, et pour finir… constatant que le gouvernement n’aurait pas la majorité en seconde lecture à l’Assemblée, le 49-3. Le 100ème depuis 1958. Tout un symbole. Le 11ème pour E. Borne depuis juin 2022.
Par 11 fois, en moins d’un an, ce gouvernement a fait adopter des lois sans vote de la représentation nationale.
D’aucun.es nous diront que tout ceci est parfaitement légitime puisque dans la Constitution ! Mais la Constitution, ce n’est pas une suite d’armes, c’est un cadre, un esprit ! Du fait de cette exercice du pouvoir institutionnel autoritaire de Macron, elle est devenue une arme permettant à un seul homme de décider contre tout un peuple.
Une procédure institutionnelle aux forceps donc mais qui n’a pas empêché les député.es NUPES de mener la bataille à l’Assemblée, d’empêcher le vote de l’article 7 prévoyant un âge de départ à la retraite à 64 ans (privant le gouvernement d’une quelconque légitimité parlementaire à sa réforme), de déjouer les mensonges de la macronie sur les soi-disant 1200 euros de pension minimale (qui sont en réalité du brut et ne concerneront que celleux qui auront une carrière complète au SMIC soit une poignée de salarié.es), sur le fait que cette réforme ne pénaliserait pas les femmes ou les carrières longues…
La vérité est que cette réforme ne fera que des perdant.es.
Violence dans la politique de maintien de l’ordre
Macron s’était déjà illustré par la violence avec laquelle il avait répondu au mouvement des gilets jaunes démarré en 2018. D’après le décompte du journaliste David Dufresne, l’usage de lanceurs de balles de défense (LBD) avait causé 353 blessés à la tête, dont 30 éborgnés, 6 mains arrachées, 4 décès.
Cette fois encore, la réponse policière est particulièrement violente.
L’ère Macron sera celle de la répression et des atteintes multiples au droit de manifester pacifiquement.
Lacrymo à gogo, tirs non réglementés de grenades, arrestations arbitraires, violences policières, intimidations, mise en cause de la fameuse BRAV-M créée par le Préfet Lallement dont la doctrine du maintien de l’ordre lui vaut d’être le symbole des violences policières.
Une violence systémique que l’on retrouve à chaque fois que le gouvernement est contesté comme le prouve la répression de la manifestation de Sainte-Soline dans les Deux Sèvres contre les méga-bassines. Un combat pour l’eau. Un combat pour le bien commun. Ce dimanche 25 mars, pas moins de 5000 grenades ont été tirées en quelques heures ! Des armes de guerre. Des unités de gendarmes en quads. Des tirs dans tous les sens. Pour protéger quoi : un trou. Côté bilan humain, « c’était une boucherie » diront certains témoins. Plus de 200 blessé.es, 2 personnes dans le coma et au pronostic vital toujours engagé. Sur ce sujet, je vous invite à lire le très bon article de Reporterre.
Une violence qui s’est accentuée depuis le 49-3 et d’autant plus forte que la mobilisation et la colère populaire ne faiblissent pas. Car malgré la décision du Conseil Constitutionnel de valider cette loi, elle reste tout autant injuste, injustifiée et illégitime. À noter que les seules mesures qui auraient pu atténuer la violence de cette loi ont été censurées par les sages barricadés derrière un cordon de CRS. Il y a fort à parier que le gouvernement le prédisait du fait que ces mesures n’avaient rien à faire dans un projet de loi de finance et relevaient du cavalier législatif (index sénior, CDI sénior, départ anticipé de certains fonctionnaires en catégorie active notamment les policiers, visite médicale à 60 ans pour les salarié.es exposé.es à certains facteurs de risque…) Il en résulte une loi encore plus sévère après la censure. Et le premier RIP non accepté.
Au-delà des questions sociales liées à cette loi, ces deux séquences, législative puis constitutionnelle, auront apporté encore un peu plus la preuve d’une Vème République, véritable monarchie présidentielle, où il est possible qu’un seul homme impose au peuple souverain sa volonté, son entêtement et son mépris. Tout cela sous l’œil complaisant du Conseil constitutionnel qui par sa décision renforce ce naufrage.
Il devient plus qu’urgent de convoquer une assemblée constituante pour une 6ème République !
Près de 80% des français.es n’en veulent pas. 93% des actifs.
Une réforme justifiée par le gouvernement par des considérations comptables elles-mêmes contestées par le COR (conseil d’orientation des retraites). Une retraite à 64 ans qui signifie plus de morts avant la retraite, plus de chômage pour les séniors, travailler jusqu’à 67 ans pour beaucoup, notamment les femmes, les carrières hachées, les longues études…, une retraite plus faible et moins longue.
Voyons maintenant et de plus près ce qu’il s’est passé à l’Assemblée nationale durant cette séquence et les votes de M. Croizier, député du Doubs.
Un bon petit soldat de la macronie
En soutien inconditionnel de la macronie et tout le long du processus législatif, M. Croizier s’est prononcé pour cette réforme des retraites et donc pour le recul de l’âge de départ à la retraite à 64 ans. C’est ainsi, qu’il a systématiquement voté contre les amendements de l’opposition qui auraient pu améliorer le sort des salarié.es et des futur.es retraité.es.
Motion de rejet du projet de loi présentée par Mathilde Panot. M. Croizier vote contre.
Demande de constitution d’une commission spéciale pour l’examen d’une proposition de loi pour une retraite universelle juste. M. Croizier vote contre.
Tandis que le RN s’abstient. Vous pourrez d’ailleurs constater tout du long de cette synthèse l’imposture RN. Toujours là pour se débiner ces député.es RN quand il s’agit de mouiller la chemise pour défendre les intérêts des plus fragiles !
Sur les régimes spéciaux, M. Croizier a voté pour leur suppression et s’est opposé à tout amendement qui visait à lutter contre cette mesure. Le RN, là encore, s’abstient ou vote contre.
Lors du dépôt de l’un de ces amendements, ses auteurs rappellent deux choses :
- « Les régimes spéciaux qui connaissent un déficit démographique le sont en grande partie du fait de la politique menée par l’État de gel des recrutements notamment dans les entreprises publiques du transport. En d’autres termes, la chasse aux dépenses publiques menées pour des raisons idéologiques par les libéraux non seulement casse nos services publics par le non remplacement de ses agents et permet ensuite de justifier en agitant le chiffon rouge du déficit de supprimer des conquis sociaux.
- Que ces régimes sont le fruit de la prise en compte de la pénibilité et de ses effets, justifiant des départs anticipés ».
Et quand il s’agit de voter un amendement visant à conditionner la suppression des régimes spéciaux à une concertation avec les partenaires sociaux, que fait M. Croizier ? Il est absent. Le RN vote contre.
Amendement NUPES visant à garantir un départ à la retraite en bonne santé et donc l’ouverture des droits à la retraite puisse intervenir dès l’âge de 60 ans.
Ses auteurs « considèrent que toute personne doit avoir le droit de partir à la retraite à un âge décent. Cette aspiration, largement partagée par nos concitoyens, se justifie d’autant plus que l’espérance de vie en bonne santé stagne aujourd’hui autour de 63 ans. Or, avec la réforme prévue par le gouvernement dans ce projet de loi, des générations entières de travailleurs se verront contraintes de poursuivre leurs activités sans jamais pouvoir profiter légitimement de leurs dernières années de vies en bonne santé. Cet amendement s’inscrit dans l’objectif de réduire le temps de travail prescrit, un principe qui implique de garantir un vrai temps de retraite en bonne santé et donc d’abaisser l’âge de départ au-dessous de l’espérance de vie en bonne santé. »
M. Croizier vote contre. Le RN s’abstient.
L’index senior
Amendement NUPES visant à renforcer l’index senior (indice pour favoriser l’employabilité des plus de 55 ans) pour de ne pas en faire un gadget, un faire-valoir factice d’une réforme massivement rejetée par nos concitoyen.nes. Il s’agit alors de le transformer et d’en faire un véritable outil « réellement ambitieux capable d’avoir un impact sur l’emploi, la qualité de l’emploi et la formation des seniors ».
M. Croizier vote contre. Le RN s’abstient.
Amendement NUPES visant à remplacer l’index sénior tel que proposé par le Gouvernement par un index qualitatif négocié paritairement avec des sanctions différenciées en fonction de la taille des entreprises. M. Croizier vote contre. Le RN s’abstient.
D’autres amendements de ce type ont été déposés avec pour objectif d’améliorer cet outil, en précisant clairement la cible ou les données produites par les entreprises. Par exemple, la nécessité de produire des indicateurs traitant des conditions de travail et des conséquences pour l’état physique et mental des salariés âgés. À chaque fois, M. Croizier votera contre.
Amendement NUPES visant à supprimer la réduction de 1,8 point de cotisations d’allocations familiales pour les rémunérations comprises entre 2,5 et 3,5 Smic pour les entreprises qui ne respecteraient les règles du jeu en matière d’emploi des séniors. M. Croizier vote contre. Tout comme le RN.
Amendement LIOT afin d’agir pour le maintien et le retour en emploi des seniors : « rendre obligatoire la négociation au moins une fois tous les trois ans dans les entreprises où sont constituées une ou plusieurs sections syndicales d’organisations représentatives ». M. Croizier vote contre. Tout comme le RN.
En conclusion de cette séquence, M. Croizier a voté pour un index senior flou, gadget, sans véritable obligation ni sanction pour les entreprises qui ne joueraient pas le jeu. Là encore, il ne dévie pas de la doctrine libérale qui à aucun moment ne souhaite réguler mais compte sur la bonne volonté des entreprises, sans contrôle, ni sanction.
Problème de financement ? Allons chercher l’argent là où il est !
Le gouvernement a durant toute cette séquence martelé les problèmes de financement de notre système de retraites pour justifier cette réforme. Bien que ces prévisions de déficit soient exagérées et globalement non viables, les député.es NUPES ont proposé par de nombreux amendements d’autres sources de financement. Si problème financier il y a, alors allons chercher l’argent là où il est, au lieu de condamner les salarié.es à deux de travail en plus !
Amendement NUPES visant à rétablir l’ISF et à affecter ses ressources de manière exceptionnelle au financement des retraites. M. Croizier vote contre, comme à chaque fois qu’il y a été question de rétablir cette mesure de justice fiscale dans les précédents projets de loi. Le RN s’abstient.
Amendement NUPES visant à réaffecter la contribution du Fonds de réserve des retraites à la CADES (La Caisse d’Amortissement de la Dette Sociale) vers le financement du système de retraites. M. Croizier et le RN votent contre.
Amendement NUPES proposant de créer un abattement fiscal au profit des retraités agricoles et des pêcheurs lorsque ces derniers décident de mettre en location une partie ou l’intégralité de leurs exploitations, une opération plus communément appelée « fermage ». M. Crozier est absent mais son groupe vote contre.
Amendement LIOT proposant d’augmenter de deux points la CSG assise sur le capital afin de dégager des ressources supplémentaires pour financer la branche « vieillesse » du système de sécurité sociale. M. Croizier vote contre, le RN s’abstient.
Amendement Nupes pour supprimer la hausse de CSG sur l’ensemble des pensions de retraite. Cette mesure instaurée de manière injuste par le gouvernement au 1er janvier 2018 a pénalisé fortement le pouvoir d’achat de 8 millions de retraités. M. Croizier est absent mais son groupe vote contre et le RN s’abstient.
Plusieurs amendements NUPES visant à augmenter significativement la taxation des retraites chapeau les plus importantes. Aujourd’hui, le taux de la contribution due par les bénéficiaires des rentes supérieures à 24 000 € par mois est de 21 %. L’un des amendements propose par exemple d’augmenter ce taux à 30 %. « Le taux proposé permet non seulement de faire contribuer les plus aisés selon les moyens dont ils disposent mais aussi de dissuader le recours à ce dispositif pour les rentes très importantes. » M. Croizier vote contre, le RN s’abstient.
Amendement NUPES visant à revenir sur l’allègement de la fiscalité sur les actions gratuites voté lors de la LFSS 2019. Ce dispositif, qui permet l’attribution gratuite d’actions, entraine une perte de recettes de 120 millions d’euros par an pour la sécurité sociale et cela dans un contexte où le manque de financement est criant. M. Croizier vote contre.
Amendement NUPES visant à créer une contribution de solidarité sur la fortune des milliardaires français. Le dernier rapport d’Oxfam France indique que seulement 2 % de la fortune des milliardaires français suffirait à financer le déficit attendu des retraites. Selon le classement Forbes 2023 Bernard Arnault et Françoise Bettencourt sont classé.es comme l’homme et la femme les plus riches du monde. Une « première » pour la France, semble-t-on nous dire fièrement ! Pour autant, pas touche les milliardaires, M. Croizier vote contre.
Amendement NUPES ayant « pour objet de mettre en place une contribution exceptionnelle sur les fonds de pension, dont le produit serait affecté à la Caisse Nationale d’Assurance Vieillesse. Les bénéfices des Fonds de pension ne cessent de croitre. La capitalisation représente déjà plus de 16 milliards d’euros de cotisations par an, dont les dividendes proviennent largement de capitaux issus de plans épargnes retraites (PER). Ces fonds sont par ailleurs des acteurs de la délocalisation, du chômage, de l’optimisation fiscale (et donc de la baisse de recettes pour l’État), et d’investissements polluants ». M. Croizier vote contre, le RN s’abstient.
Plusieurs amendements pour créer une contribution exceptionnelle sur les dividendes. Rappelons que ceux-ci ne cessent d’augmenter. Entre 2000 et 2020, les dividendes du CAC 40 ont augmenté de 269 % ! C’est plus 70% ces 10 dernières années. L’année 2022 est un nouveau record avec 56,5 milliards de dividendes versés par les entreprises du CAC 40, 45,6 milliards en 2021 et 28,6 milliards en 2020 en pleine pandémie. En 2022, les actionnaires du CAC 40 ont perçu 80 milliards en dividendes et rachat d’actions. Les sommes qui seront versées en 2023 n’auront rien à envier à 2022, tant les superprofits sont au rendez-vous. Pour autant, M. Croizier vote contre cette amendement de justice fiscale et visant à mettre à contribution le capital dans une perspective d’élargissement du financement de la protection sociale. Le RN, comme à son habitude, s’abstient.
Amendement NUPES visant à « soumettre les dividendes à l’assiette des cotisations de sécurité sociale. L’application du taux de cotisation de base (17,7 %) rendrait le solde du système largement excédentaire avec 48 milliards de recettes supplémentaires. Cela suffit à financer le droit à la retraite à 60 ans à taux plein pour toutes et tous après quarante annuités de cotisation, la revalorisation au niveau du Smic revalorisé toutes les pensions pour une carrière complète, et la revalorisation du minimum vieillesse au niveau du seuil de pauvreté. »
M. Croizier vote contre, tout comme le RN.
Amendement de Mathilde Panot, visant à « mettre à contribution les revenus du capital. Cet amendement propose d’assujettir les revenus financiers des sociétés financières et des sociétés non financières à une contribution d’assurance vieillesse, à un taux égal à la somme des taux de cotisation d’assurance vieillesse patronale et salariale du secteur privé. Cette nouvelle contribution apportera un surcroît de recettes estimé à plus de 30 milliards d’euros. » M. Croizier et le RN votent contre.
Amendement NUPES visant « à augmenter les cotisations sociales d’assurance vieillesse pour résorber le déficit du système de retraites invoqué par le Gouvernement pour justifier le décalage de l’âge légal. Comme l’indique le COR, et dans le scénario le plus pessimiste, il suffirait ainsi d’augmenter les cotisations sociales de 14 euros par mois au niveau du SMIC et de 28 euros au niveau du salaire médian pour résorber le déficit prévu en 2027. Plutôt que de faire travailler davantage les travailleuses et travailleurs – pour certaines et certains d’entre eux jusqu’à la mort, cet amendement propose ainsi de faire payer ce très léger surcroît de cotisations sociales aux entreprises et aux salariés. » M. Croizier vote contre, comme le RN.
Amendement NUPES proposant de relever les cotisations vieillesse sur les revenus supérieurs au plafond de la sécurité sociale. Cet amendement est d’autant plus intéressant dans son exposé qu’il revient sur ce que sont les cotisations : du salaire différé, du salaire différé. Des sommes donc qui appartiennent aux salarié.es.
« Notre système de retraite par répartition repose sur la cotisation des salariés. La pension de retraite s’apparente donc à un salaire socialisé et l’équilibre du système dépend du partage de la valeur ajoutée entre capital et travail. Or, depuis le début des années 1980, la part des salaires s’est effondrée au profit de celle du capital, dans le partage de la valeur ajoutée. Le système de financement des retraites s’en retrouve impacté. En effet, chaque point de PIB qui n’est pas versé en salaires équivaut à un manque à gagner de plus d’un milliard d’euros de cotisations vieillesse. Le défi pour le financement d’un autre système de retraite, véritablement protecteur, réside donc dans un partage plus juste de la valeur ajoutée. Ainsi, une hausse des salaires de 4% se traduirait par 12 milliards d’euros de recettes nouvelles. À défaut de pouvoir faire cela par amendement, nous proposons, a minima, d’augmenter le taux de cotisation salariale déplafonnée d’assurance vieillesse sur les revenus supérieurs au plafond de la sécurité sociale. Ce serait indolore pour les contribuables fortunés et source de recettes précieuses pour les retraites. Par exemple, augmenter d’un point le taux de cotisation déplafonnée, rapporterait 6 milliards d’euros. » M. Croizier vote contre, comme le RN.
Amendement NUPES pour mieux évaluer et prévenir les risques de « burn-out » « via l’instauration d’un malus pour les employeurs n’ayant pas pris les mesures nécessaires pour éliminer le risque avéré d’épuisement professionnel. Concrètement, il s’agit de relever les taux de cotisations auprès de la branche AT-MP des entreprises présentant une sinistralité anormalement élevée. Cette tarification des risques professionnels permettrait de dégager des fonds pour la réparation, l’évaluation et la prévention des risques professionnels et participerait à la promotion de la santé au travail. L’institut de veille sanitaire évaluait en 2015 à près de 500 000 le nombre de salariés en souffrance psychologique liée au travail dont 7% environ en “burn-out”, mais il est évidemment très difficile d’obtenir des chiffres solides. Le rapport d’information du 15 février 2017 de Gérard Sébaoun et Yves Censi relatif au syndrome d’épuisement professionnel soulignait les carences de la prise en charge en France de ce phénomène ». M. Croizier vote contre, le RN s’abstient.
Plusieurs amendements NUPES visant à soumettre à l’assiette des cotisations de sécurité sociale pour l’intéressement, les réserves de participation et l’abondement versé dans le cadre des plans d’épargne salariale.
« Une part de plus en plus importante de la rémunération est constituée de ces dispositifs de partage de la valeur, donnant lieu à une rémunération variable non génératrice de droits. Nous proposons de soumettre cette part des rémunérations à cotisations retraite, pour qu’elle vienne dans un premier temps contribuer à l’équilibre du régime des retraites et dans un second temps, générer des droits nouveaux pour les salariés. D’après l’économiste Michaël Zemmour, la suppression de cette exonération peut rapporter environ 3,5 milliards d’euros annuellement au système de retraites.
Cet amendement prouve qu’il est possible de trouver d’autres sources de financement qu’un report injuste de l’âge de départ à la retraite, qui fait de facto peser la charge du financement plus intensément sur les personnes aux carrières les plus longues, souvent les plus pauvres, alors qu’une grande part d’entre elles sont décédées avant 64 ans. ». M. Croizier vote contre, tout comme le RN.
Amendement NUPES visant à soumettre à l’assiette des cotisations de sécurité sociale les rachats d’action. M. Croizier vote contre.
Amendement NUPES visant « à augmenter la pénalité financière des entreprises qui ne respectent pas les objectifs de réduction des écarts de rémunération entre les femmes et les hommes.
« A poste égal (en gommant donc le fait que les métiers occupés par les femmes sont bien moins rémunérés que ceux occupés par les hommes), l’écart de rémunération est de 5,3 %.Si ces inégalités de salaire à poste égal étaient supprimées, huit milliards d’euros supplémentaires abonderaient les caisses de retraite sous forme de cotisations ». M. Croizier vote contre, le RN s’abstient.
Amendement NUPES pour mettre en place, sur le modèle de l’Espagne, une contribution exceptionnelle sur les hauts patrimoines, que nous proposons d’affecter au financement du système de retraites. Seraient concernés « tous les patrimoines dépassant les 3 millions d’euros sur les années 2023 et 2024. En Espagne, le gouvernement anticipe des recettes de plus de 3 milliards en ne sollicitant que les 0,1% les plus riches du pays. Cela correspond aux économies attendues de la réforme du gouvernement à horizon 10 ans, d’après les prévisions de l’OFCE intégrant les dépenses induites et les effets macro-économiques, contrairement à la communication mensongère du gouvernement ». M. Croizier vote contre, tout comme le RN.
Plusieurs amendements NUPES pour instaurer une cotisation exceptionnelle sur les superprofits et en particulier sur ceux des pétroliers au bénéfice du système de retraite. « La hausse des prix a permis aux grandes multinationales de générer des profits records depuis plusieurs mois. Au premier semestre de l’année 2022, les bénéfices de Total s’élèvent par exemple à 18,8 milliards d’euros… alors que cette entreprise n’a payé aucun impôt en France en 2019 et en 2020 ». M. Croizier est absent lors de certains de ces votes mais son groupe vote contre. Lorsqu’il présent il vote contre. Le RN s’abstient.
Épilogue
Au cours de la première lecture à l’Assemblée où les débats ont été stoppés au bout de 20 jours du fait de la procédure législative choisie par le gouvernement, celui-ci est resté sur ses positions, refusant toute amélioration du texte ou tout autre mode de financement qui aurait permis de trouver d’autres sources de financement plutôt que de voler deux ans de vie aux salarié.es. M. Croizier aura suivi cette même ligne tout au long des débats. Et ce malgré la mobilisation populaire exceptionnelle, une intersyndicale unie et un rejet massif de cette réforme.
Il est important de souligner que l’emblématique article 7 de cette loi, qui prévoit le recul de l’âge de départ à la retraite à 64 ans, n’a jamais été voté et donc n’a jamais été adopté par l’Assemblée nationale. Nous devons cela aux député.es LFI-NUPES qui ont bataillé à l’Assemblée pour ne pas accorder au gouvernement cette légitimité parlementaire que lui aurait attribué ce vote. Car à ce moment-là des débats, le gouvernement pouvait compter sur une majorité pour le faire voter. Dans un pays où plus de 90% des médias appartiennent à quelques milliardaires, il est évident que le martellement médiatique sur ce vote aurait été dévastateur pour la mobilisation, tant le gouvernement aurait pu se réfugier derrière la légitimité qui lui aurait été ainsi donnée.
Le Sénat s’est ensuite emparé de ce texte. Là encore, le gouvernement utilisa tous les moyens à sa disposition pour accélérer les débats. Puis vint le temps de la CMP, commission mixte paritaire, composée de 7 députés et 7 sénateurs, censée trouver un texte commun entre les deux assemblées du Parlement. Une composition dominée par la macronie avec pour « ordre » de ne pas divulguer la teneur des débats qui s’y sont tenus. Une supercherie de plus. Nous avons pu compter, là encore sur Mathilde Panot, membre de cette commission pour comprendre ce qu’il s’y passait réellement.
Le texte ainsi rédigé par la CMP est alors arrivé devant l’Assemblée nationale pour une seconde lecture le 16 mars 2023. À cette date et du fait de la mobilisation populaire toujours aussi puissante, le gouvernement n’avait plus de majorité pour faire adopter son texte. C’est pourquoi, E. Borne dégaina son 11ème 49-3, en seulement 8 mois de gouvernement ! Quel aveu de faiblesse ! Quelle nouvelle violence !
S’en est suivi le dépôt d’une motion censure transpartisane déposée par le groupe LIOT et soutenue par toute la NUPES. Lundi 20 mars, jour du vote de la motion de censure. 9 voix. Il aura manqué 9 voix sur les 287 voix requises pour que ce gouvernement soit renversé. Le gouvernement ne sera donc pas renversé mais il aura tremblé.
Les dégâts dans la population sont encore plus profonds. La loi prévoyant le recul de l’âge de départ à la retraite à 64 ans est adoptée, sans vote, sans légitimité parlementaire ou populaire.
Une colère populaire qui grandit et s’élargit à chaque nouvelle prise de parole du monarque. « Ce n’est pas les casseroles qui feront avancer la France » lance-t-il depuis l’Alsace où il s’est fait copieusement hué. Il est évident que ni lui, ni ce gouvernement ne feront avancer la France et le progrès social. Alors continuons à prendre notre destin en main. Continuons la lutte, jusqu’au retrait.
La suite au prochain épisode…
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